Du 26 au 28 octobre 2023, Brazzaville, la capitale du Congo, a abrité le 2e sommet des trois grands bassins forestiers de la planète. Il s'agit de l'Amazonie (Amérique Latine), du Congo (Afrique Centrale) et de Bornéo Mekong (Asie du Sud-Est). La première édition avait eu lieu dans la même ville du 31 mai au 3 juin 2011.
Le bassin amazonien en Amérique du Sud, le bassin du Congo en Afrique centrale et le bassin Bornéo-Mékong en Asie du Sud-Est abritent 80 % des forêts tropicales du monde et une part importante de sa biodiversité. Les systèmes écologiques dynamiques des trois bassins, qui couvrent collectvement une superficie estimée à 720 millions d'hectares de forêt, abritent environ 900 millions de personnes. Pour les personnes vivent au sein de ces écosystèmes, y compris les peuples autochtones, chacun avec sa propre langue, sa propre culture et son propre territoire, la forêt peut être une source de revenus, de nourriture et de médicaments ainsi qu'une identité.
Les crises mondiales auxquelles l'humanité est confrontée, notamment le changement climatique, la perte de biodiversité et la pollution, constituent une menace existentielle pour toute vie et contribuent directement et indirectement à de nombreuses violations des droits humains dans le monde. La pollution est omniprésente et menace la santé et les moyens de subsistance de millions de personnes en contaminant l'air, l'eau, les aliments et les sols. Les actions humaines, y compris les modes de consommation et de production non durables, ont fait peser une menace sans précédent sur la biodiversité, poussant les systems naturels complexes de notre planète vers un point de rupture catastrophique. Les catastrophes liées au changement climatique sont désormais monnaie courante, y compris les nouvelles temperatures extrêmes, les sécheresses, l'insécurité alimentaire, le stress hydrique et les phénomènes météorologiques extrêmes.L'objectif de 1,5 degré Celsius de l'Accord de Paris risque sérieusement de s'éloigner, ce qui met en péril les pays qui ont le moins contribué à la crise climatique.
Alors que toutes les formes de dégradation de l'environnement exacerbent les risques préexistants et/ou créent de nouveaux risques pour les droits humains, les personnes les plus touchées sont souvent celles qui se trouvent déjà dans des situations vulnérables, y compris celles qui dépendent directement de la nature pour survivre.
Pour relever les défis actuels dans les Trois Bassins, il faut un changement transformateur guidé par l'interdépendance entre les populations et la nature, ainsi que des mécanismes efficaces pour s'attaquer aux causes extraterritoriales de la dégradation de l'environnement dans ces régions. L'humanité a besoin d'une approche holistique par rapport au développement durable qui place les personnes au-dessus des profits, qui garantisse la capacité des générations futures à jouir de leurs droits humains et qui soit fondée sur les droits de l'homme, y compris l'égalité des genres et le droit à un environnement propre, sain et durable.
Placer les droits humains au centre des discussions du Sommet des Trois Bassins est une question d'obligation et de politique saine. Selon le Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat des Nations Unies (GIEC), des approches équitables, fondées sur les droits, inclusives et participatives, conduisent à des résultats plus durables, efficaces et légitimes et sont essentielles pour un développement résilient au changement climatique. Les messages qui suivent mettent en évidence la façon dont l'action environnementale fondée sur les droits devrait guider les efforts visant à protéger les Trois Bassins et les droits des personnes qui en dépendent, y compris le droit à un environnement propre, sain et durable. Les États des trois bassins devraient :
1. Garantir la jouissance du droit humain à un environnement propre, sain et durable pour tous, en accordant une attention particulière aux individus, aux groupes et aux peuples en situation de vulnérabilité, y compris les femmes, les enfants, les peoples autochtones et les communautés traditionnelles.
Toutes les personnes, quel que soit l´endroit où elles se trouvent, ont droit à un environnement propre, sain et durable, comme l'ont reconnu le Conseil des droits de l'homme dans sa résolution 48/13 et l'Assemblée générale des Nations Unies dans sa résolution 76/300 sur le droit humain à un environnement propre, sain et durable. L'air pur, un climat sûr, l'accès à l'eau potable et à un assainissement adéquat, une alimentation saine et produite de manière durable, des environnements non toxiques pour vivre, travailler, étudier et jouer, la biodiversité et des écosystèmes sains, l'accès à l'information, la participation du public à la prise de décision, et l'accès à la justice et aux recours sont généralement reconnus comme des éléments clés du droit à un
environnement propre, sain et durable. Le droit à un environnement propre, sain et durable est essentiel à la jouissance de tous les droits, y compris le droit à la vie, à la santé, à l'alimentation, au logement, à l'eau et à l'assainissement, et à l'autodétermination.
L'accélération des efforts, des initiatives et des politiques visant à promouvoir, restaurer et protéger les écosystèmes des Trois Bassins, à assurer leur utilisation responsable et à gérer durablement les forêts, afin d'enrayer et d'inverser la situation de perte de biodiversité et de dégradation des terres est directement liée aux efforts visant à lutter contre les inégalités, à assurer une transition juste vers des économies saines sur le plan environnemental et socialement équitables et à réaliser les droits humains pour tous. Le Sommet des Trois Bassins représente une occasion pour les États de
s'engager à prendre des mesures concrètes pour prévenir, s'adapter et remédier aux atteintes aux droits humains causées par le changement climatique, la perte de biodiversité et la pollution, y compris les dommages prévisibles à long terme.